What If : Les morts marchent tous au-dehors...

Qu'est ce qui régit notre monde ? Est-ce son caractère immuable, constant avant même notre naissance et qui nous précède bien après notre trépas ? Ou concorde-t-il à quelque rumeur grouillante d'une humanité que les Hommes ont eux-même forgé ? Chaque individu est la pièce de cet engrenage suprême. Et s'il existe des obsolescences programmées dans les rouages mécaniques de ces grands assemblages sophistiqués, le claque de cette métaphore peut aussi se superposer à la réalité humaine. La fin du monde tels que ses habitants — parasites — le connaissent ne peut être que l'anéantissement de leur race. Car ils en sont les principaux témoins, et les principaux acteurs lorsque tombe le rideau de cette vaste scène sphérique dépouillée.

La ville tait son myocarde. Les artères ne battent plus du pouls de sa population frénétique. Les gens ont cessé de courir... Certaines figures errent, leurs yeux blancs ne contemplant plus que le vide en quête d'appâts charnels orchestrées par un instinct primaire, ultime dictée de leur cerveau pourri. Ce soir, l'atmosphère est encore empestée de miasmes des macchabées itinérants.

« Ils » ont assujetti la vie depuis des temps inconnus. Depuis sa rupture, la société ébranlée a cure du calendrier. Sans doute sont-ils les prédateurs depuis des mois ou quelques années. La préoccupation de survie remplace le souci de la localisation temporelle.

Perdu dans un siècle et dans l'espace d'une cité assiégée par l'ennemi, Lionel se tenait reclus de ses Êtres impies sous la forteresse grossière d'une ancienne supérette barricadée avec des matériaux de fortune. Il y avait trouvé refuge dans son périple et avait pu pénétrer ce sanctuaire sécure grâce à quelques médicaments ayant constitué sont passe-droit d'entrée. Il n'était donc point seul dans ce rempart de misère. D'autres figures toutes aussi fatiguées se trouvaient avec lui. Acculées. Rongées par l'apocalypse. Ces traits réverbéraient les siens. Épuisés et cireux des horreurs qu'il avait que trop subi...

Ses canaux encéphaliques ressassaient des souvenirs douloureux. Des visages aimés tortueux, avilis et meurtris... Et lui, survivrait avec ses pensées comme unique ressource et dernier portrait d'une famille autrefois entière.

Lionel n'avait pas envie de passer cette nuit avec sa conscience inquisitrice. Alors il fit quelque pas à proximité d'un de ses pairs qui ne dormait pas et se prostra à ses côtés avec un sourire délavé d'avoir trop servi.

« J'aimerais bien compter de nouveau les moutons comme en ce temps là... Je ne sais même pas si ils ont seulement survécu. » La phrase d'accroche se voulait tendre. La générosité de l'ancien journaliste s'entêtait encore avec la tendresse de l'ancien père de famille. Il était le paternel de fantômes désormais. « Vous sentez vous le coeur à discuter ? C'est plus plaisant de passer la nuit à parler avec quelqu'un que dans la solitude du passé qui ressurgit parfois, surtout dans notre contexte. »